Depuis quelques années, la qualité de vie au travail ou encore « QVT » a pris place au sein des entreprise, et se voit considérée par les employeurs comme un moyen de prévention des risques psychosociaux (RPS). Contrairement aux idées reçues, elle ne consiste pas à aménager des espaces de détente ou des actions de bien-être sur le lieu de travail. L'objectif, les enjeux et la mise en place sont bien plus pertinents et complexes qu'ils n'y paraissent.
Nous aborderons dans cet article :
- La définition de la qualité de vie au travail.
- Les raisons de la transition de la QVT vers la QVCT.
- Ses enjeux en entreprise.
- Ses bénéfices pour les employeurs.
- Comment mettre en place cette démarche au sein de son entreprise.
Définitions : QVT et QVCT
La qualité de vie au travail a été créée à l'issue d'un accord national interprofessionnel (ANI) en juin 2013. Elle se définit par les actions qui permettent de concilier amélioration des conditions de travail pour les salariés et performances de l'entreprise.
Elle vise en premier lieu :
- Le travail, bien entendu.
- Les conditions de travail, notamment la possibilité qu'elles favorisent ou non de « faire du bon travail », dans une ambiance agréable au sein de son organisation.
- La reconnaissance par son entreprise.
- Le respect de l'équilibre vie professionnelle et personnelle.
Le 9 décembre 2020, un nouvel ANI sur la santé au travail est défini. Cet accord est ensuite entériné par la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail. A compter du 31 mars 2022, la QVT est alors remplacée dans le Code du Travail par la QVCT, qui signifie « qualité de vie et des conditions de travail ».
Elle considère :
- L'articulation des sphères professionnelles et personnelles.
- Les conditions de travail (management, moyens, relations interpersonnelles).
- L'utilité et le sens donné au travail.
- L'organisation du travail avec entre autres le télétravail.
- L'expression des salariés et leur capacité à agir sur le contenu de leur travail.
Autant de critères qui permettent ainsi de définir la perception de la qualité de vie au travail.
Mais vous vous demandez probablement :
- Pourquoi avoir lié les conditions de travail à la QVT ?
- Si ce nouvel acronyme change l'approche de la qualité de vie au travail et les enjeux RH ?
Pourquoi ce changement ?
Comme évoqué en début d'article, la qualité de vie au travail s'inscrit comme une action de prévention aux RPS. Malheureusement les organisations n'ont pas toujours compris ce qu'elle signifiait et l'ont souvent survolée, voire réduite à des moments de convivialité et/ou de détente. Ne plus parler de QVT mais de QVCT permet par conséquent un discours plus clair !
En effet, elle possède un champ d'actions plus élargi et déclenche même une petite révolution dans le monde du travail. Elle a pour vocation l'amélioration de la qualité de vie au travail des salariés en s'inscrivant dans une série d'actions reliées de manière directe :
- Aux conditions de travail de ces derniers.
- À leur capacité à s'exprimer et à agir sur le contenu de celui-ci.
- À celle des employeurs de considérer la réalité et de ne plus faire « la politique de l'autruche » concernant les dysfonctionnements.
C'est pourquoi la QVCT fait désormais partie des thématiques de négociation obligatoires prévues par le code du travail. Le préambule de l'accord précise qu'il s'agit d'un « investissement aux effets durables, qui contribue à la performance individuelle et collective ».
Si le nouvel acronyme n'est pas encore acté auprès de tous les DRH, l'enjeu reste néanmoins de taille.
Les enjeux de la QVCT en entreprise
Dans un contexte de crise sanitaire qui perdure, cette évolution rappelle aux institutions que la performance ne peut pas se construire sans agir de manière quotidienne sur la qualité de vie et des conditions de travail. Ce nouvel accord souligne également la responsabilité de l'employeur en matière de santé au travail et met l'accent sur la prévention au travail. Il se doit de protéger la santé et la sécurité de ses salariés. En cas de manquement, sa responsabilité civile peut être engagée.
Le défi RH est donc de considérer chaque acteur, de débattre avec lui sur la manière d’effectuer le travail et de réfléchir ensemble aux améliorations qui peuvent être apportées. En proposant d'articuler la qualité de vie des salariés, leurs conditions de travail et la performance de leur organisation, l'enjeu RH devient majeur : faire de la QVCT un pilier stratégique et induit une approche intégrative.
Pour y parvenir, les DRH vont devoir mettre en place une série d'actions sérieuses connectées aux conditions de travail, recentrer les axes organisationnels et considérer :
- La qualité du contenu du travail.
- La qualité de l'environnement physique.
- La possibilité de réalisation et de développement personnel.
- La possibilité de concilier vie professionnelle et personnelle.
- Le respect de l'égalité professionnelle.
- La qualité de l'engagement de tous à tous les niveaux de l'entreprise.
- La qualité de l'information partagée au sein de l'entreprise.
- La qualité des relations de travail.
- La qualité des relations sociales construites sur un dialogue social actif.
- La qualité des modalités de mise en œuvre sur l'organisation du travail.
L'ANDRH a ainsi défini les piliers d'une démarche de QVCT co-construite et se décline par :
- La mesure : avec un diagnostic en premier lieu, puis un point régulier et continu pour évaluer les progrès.
- Une dynamique participative : avec l'intégration des salariés à agir sur l'organisation du travail.
- Une dimension collective : avec la formation et l'interaction de tous les acteurs de l'entreprise, et ce à tous les niveaux.
- Une logique d'expérimentation : avec la mise en place du "Test & Learn".
- Un dialogue professionnel sur la qualité du travail et les moyens d'actions.
- Une réflexion continue sur l'amélioration des conditions de travail.
En résumé, la qualité de vie et des conditions de travail vise un double objectif : l'amélioration des conditions de travail et le développement de la performance organisationnelle ; et permet ainsi de développer un environnement stable et résilient sur le long terme.
Les bénéfices pour les employeurs
Cette démarche nécessite certes de l'investissement et de la méthodologie, pour autant elle ne doit pas être réduite qu'à une notion de contrainte, mais davantage comme une opportunité.
Dans un contexte où le recrutement et la gestion des talents deviennent complexes, la QVCT peut devenir un atout d'attraction, de motivation et de fidélisation des équipes qui se sentiront considérées, écoutées, valorisées et comprises. Ainsi au travers d'un engagement plus fort, la productivité se verra améliorée.
Elle peut également permettre de répondre aux attentes des Milléniaux et de la Génération Z arrivés sur le marché du travail, pour qui les pratiques managériales nécessitent un vrai remaniement.
Mais vous vous demandez probablement comment la mettre en œuvre ?
Comment mettre en place une démarche QVCT au sein de son entreprise ?
Selon l'ANDRH, les « actions efficaces » en faveur de la qualité de vie et des conditions de travail doivent porter sur l’« organisation », l’« amélioration continue » et le « cadrage » :
- Actions sur l'organisation :
- Flexibilité des horaires, du temps de travail.
- Télétravail.
- Déconnexion.
- Evaluation et répartition de la charge et des responsabilités.
- Clarté du sens du travail.
- Primes variables.
- Polyvalence des rôles.
- Refonte des espaces.
- Amélioration continue :
- Formation des managers et des instances représentatives du personnel (IRP).
- Conduite des projets participatifs.
- Espace de discussion sur le travail.
- Référents QVT.
- Cadrage :
- Plan SQVT.
- Chartes d'actions.
- Actions.
- Normes.
Pour plus de pertinence, la QVCT nécessite également d'être mesurée selon plusieurs indicateurs :
- Indicateurs de santé.
- Indicateurs de perception.
- Indicateurs de fonctionnement.
- Sans oublier d'y coupler des indicateurs démographiques.
Vous l'aurez donc compris, une telle démarche nécessite de former les managers, d'intégrer dans l'équation l'ensemble des parties prenantes de l'entreprise, d'organiser des discussions sur le travail et les conditions avec les salariés, puis d'évaluer de manière continue les actions mises en œuvre en vue de les faire évoluer selon les besoins.
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Amélie Toupry - Conseillère Grands Comptes au sein du Groupe Evolution & Perspectives
